Il y a quelques semaines, le département Information et Communication du Ministère de la Culture et de la Communication a lancé un appel d’offres pour le moins surprenant. Il s’agissait de confier la traduction en huit langues des sites Web « culture.fr » et « culture.gouv.fr », mais exclusivement… à un logiciel de traduction automatique (!), comme le précise le Cahier des clauses techniques et administratives : « L’objet de la prestation consiste en l’hébergement d’un service traduction automatique, en temps réel, des sites web du ministère de la culture et de la communication culture.fr et culture.gouv.fr. Le principal livrable est le service de traduction en ligne lui-même et sa disponibilité 24h sur 24. »
De nombreux observateurs ont fait valoir que la Révision générale des dépenses publiques n’était sans doute pas étrangère à cette vision économe du rayonnement de la Culture française à l’étranger. En tous les cas, les traducteurs humains ne sont, heureusement, pas restés indifférents à cet appel d’offres qui ne les concernait pas, et ils ont régai par la voix de la Société française des traducteurs (SFT) et de l’Association des Traducteurs littéraires de France (ATLF). Cherchant une riposte pertinente, les deux associations ont rédigé une lettre à Mme Christine Albanel, Ministre de la Culture, et l’ont accompagnée d’une version française produite automatiquement par Google Translator sur la base de la traduction en anglais de cette lettre, réalisée, elle, par un professionnel. La lecture comparée des deux textes français est éloquente et amusante. Je n’ai malheureusement pas trouvé la version anglaise de la lettre, qui aurait permis de contrôler tous les aspects du problème. Inutile de dire que les réactions, sur le Web, ont été nombreuses (voir par exemple le billet de ActuaLitte, ou celui de BibliObs, lequel n’est plus en ligne). En revanche, il semble que le Ministère de la Culture n’a pas encore réagi à ce courrier.
Le plus navrant, dans tout cela, c’est que les logiciels de traduction automatique ont une utilité réelle… à condition d’être employés par des professionnels (qui, en général, ne les apprécient guère). Même softissimo, distributeur du logiciel Reverso, le dit dans son Livre blanc sur les outils de traduction automatique ! Les phrases qu’ils produisent sont souvent de bonnes ébauches partielles de la traduction correcte finale (et les textes envoyés à Mme Albanel le montrent bien). Mais il est certain qu’on ne saurait sans danger les laisser travailler seuls et faire confiance à leur résultat ! Autre regret: Pourquoi donc le Ministère ne s’est-il pas fait conseiller dans sa démarche d’achat par des professionnels. Après tout, de nombreuses agences collaborent à des projets de traduction longs et répétitifs en mêlant traduction automatique, outils à mémoire de traduction, et traducteurs professionnels.
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